Un pas de plus vers l’interdiction de la spéculation sur les dettes des Etats
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Une nouvelle victoire a été remportée le 5 juillet 2011 au Parlemet Européen dans le combat mené pour interdire la spéculation sur les dettes des Etats. Le Parlement a en effet voté à une très large majorité l’interdiction des pratiques les plus spéculatives contre les dettes souveraines.

Ci-après le post de Pascal Canfin, eurodéputé EELV, paru sur blog.libé.fr

Le Parlement a adopté aujourd’hui [le 5 juillet 2011] en plénière à Strasbourg, trois mois après le vote en commission économique,  le projet de loi européenne visant à interdire la spéculation sur les dettes des Etats européens. En tant que rapporteur du texte, autrement dit responsable de la négociation pour le Parlement, ce vote avait une importance toute particulière pour moi. Dans le contexte de crise de la zone euro, ce vote  constitue un pas de plus dans la lutte contre la spéculation qui accule des Etats à la faillite.

Le Parlement s’est en effet prononcé en faveur d’une version ambitieuse du texte qui propose notamment d’interdire l’utilisation des CDS (credit default swap) – les instruments financiers qui permettent de s’assurer contre la faillite d’un Etat – dans un but spéculatif. En effet, ces instruments ont été dévoyés. Alors qu’ils sont supposés permettre à un investisseur qui détient des obligations d’un pays de se couvrir contre le risque de ce pays, ils sont aujourd’hui majoritairement utilisés pour spéculer sur la faillite des Etats. Ainsi, des fonds spéculatifs n’ayant jamais investi un euro en Grèce ont utilisé les CDS pour parier sur la faillite de ce pays. Des « prophéties auto-réalisatrices », puisque la spéculation sur les CDS pousse à la hausse les taux d’intérêt et renchérit le cout de financement des Etats. Des paris sur le dos des contribuables européens qui sont appelés à renflouer les Etats acculés à la faillite. Une réalité à laquelle le Parlement entend mettre fin.

Outre le rôle d’amplificateur de crise des CDS, ces instruments compliquent également les scénarii de sortie de crise. La faillite de la Grèce,  ou même la simple restructuration de sa dette, entraînerait l’activation des CDS – les émetteurs de CDS devraient payer une prime d’assurance aux acheteurs de protection – dont personne aujourd’hui ne semble être en mesure d’estimer les conséquences. Dans tous les cas, cette prime aux spéculateurs en cas de restructuration serait particulièrement insupportable au moment où les Grecs doivent subir une austérité aux conséquences sociales désastreuses.

Aujourd’hui, le Parlement a très clairement exprimé son refus de voir plus longtemps les marchés jouer avec la dette des Etats européens. Seuls le groupe libéral et le groupe des conservateurs britanniques ont, pour des raisons idéologiques évidentes, rejeté ce texte. Les négociations avec les Etats vont reprendre dès la semaine prochaine, l’entrée en vigueur du texte supposant un accord sur un texte commun entre le Parlement et les Etats. J’espère que ce vote convaincra les Etats qu’il est plus que temps pour eux de reprendre le pouvoir sur les marchés.

Pascal Canfin